Selon une étude récemment publiée dans le journal Cytotherapy, un médicament anti-inflammatoire courant appelé célécoxib peut favoriser la survie des cellules souches et la cicatrisation lorsque ces cellules sont injectées dans les plaies. C’est ce qu’ont constaté les chercheurs de l’Institut de technologie chimique à Hyderabad, en Inde, au siège de l’Academy of Scientific & Innovative Research du CSIR.
L’inflammation est normale lors du processus de guérison d’une plaie. Au cours de la cicatrisation, des leucocytes, les macrophages, sont attirés vers la zone de la plaie et y relâchent des substances appelées cytokines qui provoquent une réponse inflammatoire. Des enzymes telles que la cyclo-oxygénase-2 (COX-2) augmentent elles aussi leur activité, contribuant ainsi à l’inflammation. C’est ce qui stimule la croissance tissulaire et le flux sanguin et favorise la cicatrisation ; lorsque l’inflammation s’atténue, les cellules de la peau augmentent afin de recouvrir la plaie.
Cependant, si l’inflammation est grave et prolongée, comme dans le cas d’une plaie chronique, les conséquences peuvent être tragiques. En effet, chez certains patients atteints de diabète, elle peut conduire à de graves complications et, dans certains cas, à l’amputation.
Bien souvent, les traitements conventionnels sont inefficaces et les scientifiques sont toujours à la recherche de nouvelles méthodes pour guérir ces plaies obstinées. L’une de ces méthodes consiste à injecter dans la plaie des cellules souches capables de se transformer en d’autres types de cellules (par exemple en cellules de l’épiderme telles que les kératinocytes) afin de favoriser le processus de cicatrisation.
« La thérapie par cellules souches est très prometteuse mais est limitée par le micro-environnement des blessures graves qui sont souvent enflammées », déclare Amitava Das, principal auteur de cette étude.
En effet, les cellules souches ne sont pas des médicaments comme les autres, elles sont vivantes et, comme toute forme de vie, si elles se retrouvent dans un environnement hostile, elles peuvent mourir. L’inflammation sévère qui accompagne une plaie chronique tue la plupart des cellules injectées, et c’est l’une des raisons pour lesquelles, jusqu’à présent, les cellules souches n’ont pas été efficaces dans le traitement des plaies chroniques.
Das et ses collègues ont formulé l’hypothèse que le célécoxib, un anti-inflammatoire courant qui inhibe de façon sélective l’enzyme pro-inflammatoire COX-2, pourrait favoriser la survie des cellules souches et ainsi rendre plus efficace la thérapie régénérative des plaies chroniques en empêchant à l’inflammation de tuer les cellules utilisées. Le célécoxib a un mécanisme d’action similaire à celui d’autres célèbres anti-inflammatoires administrés en cas de maux de tête (par exemple aspirine et ibuprofène) et il est généralement prescrit comme antalgique.
Afin de tester cette hypothèse, les chercheurs ont utilisé un modèle de plaie expérimentale chez 4 groupes de souris. Le groupe de contrôle n’a reçu aucun traitement, le deuxième groupe a été traité avec des cellules souches provenant de moelle osseuse, injectées dans la peau proche de la plaie. Un troisième groupe a reçu du célécoxib par voie orale et le dernier du célécoxib par voie orale ainsi qu’une injection de cellules souches dans la peau autour de la plaie. Après une semaine, les scientifiques ont examiné le niveau de cicatrisation, d’inflammation et de survie des cellules souches dans chacun des groupes.
Comme il était à prévoir, la réponse inflammatoire était manifeste dans chaque groupe pendant toute la durée de l’expérience. Cependant, après une semaine, les souris traitées avec le célécoxib et les cellules souches ont montré une meilleure guérison et cicatrisation comparées aux souris non traitées ou aux souris traitées avec les cellules souches seules ou le célécoxib seul. Chez les souris qui avaient reçu le célécoxib, on a constaté une augmentation non négligeable du nombre de cellules souches ayant survécu et s’étant intégrées au tissu de la plaie, ainsi qu’une diminution du nombre de globules blancs inflammatoires et des niveaux de cytokines dans la plaie, y compris une cytokine appelée interleukine-17A.
Afin de mieux comprendre la corrélation entre le célécoxib et la survie des cellules souches, les chercheurs ont tenté d’identifier les cytokines ou enzymes qui influencent directement ou indirectement le processus. En utilisant des macrophages et des cellules souches élevées en laboratoire, ils ont démontré que c’était l’interleukine-17A qui était responsable de l’activation des macrophages susceptibles de tuer les cellules souches dans la plaie. En inhibant l’enzyme COX-2 et, par conséquent, l’interleukine-17A, le célécoxib était à même d’empêcher indirectement aux macrophages de tuer les cellules souches injectées, leur permettant au contraire de guérir la plaie.
Mais ce n’est pas tout : les scientifiques ont également constaté que le célécoxib augmente directement la différentiation des cellules souches en kératinocytes – les cellules de l’épiderme nécessaires à la cicatrisation. En aidant la survie des cellules souche et en favorisant leur différentiation en cellules de la peau, le célécoxib produit un double effet cicatrisant.
« Grâce à ces découvertes, nous pourrions surmonter certaines des limitations au succès des thérapies par cellules souches pour les plaies chronique », déclare Das. « Personnellement, j’ai le sentiment que ces recherches vont redonner espoir aux patients atteints de plaies chroniques. Nous avons même pu identifier les cibles moléculaires responsables de ces effets, ce qui permettrait aux scientifiques de trouver de nouveaux produits utiles à ces fins. »
Source : Elsevier. "Reducing inflammation protects stem cells during wound repair: Anti-inflammatory drug Celecoxib can promote stem cell survival and wound healing in mice." ScienceDaily, 20 July 2017.