Dans une étude menée par Songtao Shi, président et professeur du département d’anatomie et de biologie cellulaire de la faculté de médecine dentaire de l’université de Pennsylvanie et publiée dans le journal Science Translational Medicine, il émerge que l’une des raisons pourrait résider dans les caractéristiques des cellules souches mésenchymateuses gingivales pouvant donner naissance à une grande variété de types de cellules.
Selon Shi, cette étude représente la convergence des différentes voies explorées par l’équipe de chercheurs. Tout d’abord, ils sont dentistes et savent bien que le processus de cicatrisation est plus rapide à l’intérieur de la bouche que sur la peau. Deuxièmement, en 2009 ils avaient découvert que la gencive contient des cellules souches mésenchymateuses et que ces dernières peuvent faire beaucoup de bien du point de vue thérapeutique. Troisièmement, les cellules souches mésenchymateuses sécrètent une grande quantité de protéines. Ils se sont donc demandés de quelle façon les cellules souches mésenchymateuses gingivales sécrétaient toutes ces substances et accéléraient la cicatrisation des plaies dans les muqueuses.
Des travaux précédents conduits par le groupe de Shi avaient révélé que de nombreuses fonctions des cellules souches mésenchymateuses étaient effectuées en sécrétant des molécules de signalisation dans les vésicules extracellulaires. Par conséquent, pour comprendre ce qui distingue les cellules souches mésenchymateuses présentes dans la gencive de celles présentes dans la peau, l’équipe de Pennsylvanie a commencé à comparer les vésicules extracellulaires de ces deux types de cellules. Ils ont découvert que les cellules souches mésenchymateuses gingivales contenaient plus de protéines en général, y compris la IL-1RA, une protéine qui modère l’inflammation en bloquant une cytokine inflammatoire. Il se trouve que la IL-1RA est également utilisée comme thérapie pour le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, une condition inflammatoire.
Successivement, ils se sont concentrés davantage sur ce qui pouvait contrôler la sécrétion de IL-1RA et autres cytokines. Ils suspectaient la Fas, protéine qu’ils avaient précédemment reliée à la régulation immunitaire. Ils ont découvert que les cellules souches mésenchymateuses gingivales possédaient plus de Fas que les cellules souches mésenchymateuses de la peau et que les souris avec carence en Fas présentaient une quantité ainsi qu’une sécrétion réduites de IL-1RA.
D’ultérieurs essais moléculaires ont révélé que les Fas forment un complexe protéique avec la Fap-1 et la Cav-1 pour déclencher la sécrétion de petites vésicules extracellulaires. Afin d’établir le lien avec la cicatrisation, ils ont examiné les tissues des plaies et découvert que la IL-1RA était présente en quantité supérieure dans les cellules souches mésenchymateuses gingivales en bordure de la bouche. Les plaies gingivales chez les souris en carence de IL-1RA ou chez qui la protéine avait été inhibée ont mis plus de temps à cicatriser.
Au contraire, lorsque les chercheurs ont isolé la IL-1RA qui avait été sécrétée par les cellules souches mésenchymateuses gingivales et l’ont injectée dans les plaies, la cicatrisation s’est accélérée de façon significative.
En effet, les cellules souches mésenchymateuses, en particulier celles gingivales, sécrètent une grande quantité de cytokines à travers une vésicule extracellulaire. Ces découvertes pourraient avoir un intérêt tout particulier pour les personnes atteintes de diabète, maladie dont l’une des principales complications est le retard dans la guérison des plaies. Lors de cette étude, les chercheurs ont découvert que les cellules souches mésenchymateuses gingivales chez les souris atteintes de diabète étaient moins à même de sécréter des vésicules extracellulaires que les cellules souches mésenchymateuses gingivales chez les souris saines, et que leurs cellules souches mésenchymateuses gingivales comportaient également une sécrétion moindre de IL-1RA. L’introduction de vésicules extracellulaires sécrétées par les cellules souches mésenchymateuses gingivales de souris saines réduisait le temps de guérison des plaies chez les souris atteintes de diabète.
Leur article ne traite qu’en partie le mécanisme par lequel les cellules souches influencent la cicatrisation, mais sur cette base, ils envisagent d’utiliser ces cellules ou bien les vésicules extracellulaires pour cibler de très nombreuses pathologies, y compris le retard dans la guérison des plaies typiques des patients diabétiques, en espérant arriver à l’application des résultats de leurs travaux au domaine clinique. Ces cellules sont faciles à prélever sur la gencive et cela en fait une cellule idéale pour usage clinique. Un grand travail les attend, mais pourrait bien conduire à l’utilisation de ces cellules afin de réduire la formation de cicatrices disgracieuses, d’améliorer la guérison des plaies et même de traiter des maladies inflammatoire et auto-immunes.
Source : Science daily; Unraveling how mesenchymal stem cells from gum tissue accelerate wound healing; March 14 2018.