En 2012, 1,5 million de patients sont morts à cause du diabète. Actuellement, 425 millions de personnes dans le monde sont atteintes de diabète, avec des chance de mourir 2,5 fois supérieures ; 15 pourcent ou plus d’entre elles souffrent d’ulcères du pied diabétique. Chaque année, les États-Unis dépensent 176 milliards de dollars pour cette maladie.
Alors que la cicatrisation des ulcères du pied diabétique demande de 90 à 150 jours, une équipe d’ingénierie biomédicale veut réduire cette période à 21 jours en amplifiant ce que l’organisme fait déjà naturellement : construire des couches de nouveau tissu avec l’aide de monoxyde d’azote. Chez les patients diabétiques, une faible production de monoxyde d’azote réduit la capacité de guérison des cellules de l’épiderme. Mais le simple fait d’augmenter le monoxyde d’azote n’est pas suffisant. L’idée est de concevoir des bandages chargés de monoxyde d’azote qui adaptent la libération chimique aux conditions des cellules. Pour ce faire, il faut tout d’abord établir ce qui se produit à l’intérieur des cellules de l’épiderme en présence de monoxyde d’azote.
Megan Frost, présidente par intérim du Département de kinésiologie et physiologie intégrative, professeure agrégée d’ingénierie biomédicale et professeure agrégée affiliée à la faculté des sciences et de l’ingénierie des matériaux, dirige un laboratoire de biomatériaux polymériques auprès de l’université technologique du Michigan et travaille sur une technologie pour la libération du monoxyde d’azote. Il s’agit d’une substance chimique à fort potentiel cicatrisant, mais dont la seule application n’est pas suffisante.
Lorsqu’une plaie cicatrise, trois types de cellules dermiques entrent en jeu. Les macrophages sont les premiers à intervenir et s’activent dans les 24 premières heures après la lésion. Ensuite les fibroblastes agissent comme des ingénieurs de l’organisme et aident à établir la matrice extracellulaire qui permet aux cellules suivantes, les kératinocytes, d’intervenir pour les gros travaux de reconstruction. Les fibroblastes représentent un élément clé dans ce processus et des études précédentes ont établi que leur intervention différée chez les patients atteints de diabète pourrait être un facteur déterminant dans les délais élevés de guérison.
C’est là qu’entre en jeu le monoxyde d’azote, un genre de régulateur chimique qui reporte le processus à un rythme correct. Mais inonder une plaie de monoxyde d’azote n’est pas suffisant ; il faut tenir compte de la quantité de monoxyde d’azote réellement nécessaire. Comment mesurer le monoxyde d’azote ? La pratique actuelle consiste à mesurer l’ion nitrite au lieu du monoxyde d’azote − une méthode trompeuse selon Frost, car l’ion nitrite est un sous-produit sans signature temporelle. Alors que le nitrite, très stable, est facile à mesurer, il est incapable de transmettre en temps réel le statut de guérison comme le peuvent les niveaux de monoxyde d’azote.
C’est pourquoi le laboratoire de Frost a conçu un appareil de mesure du monoxyde d’azote. C’est un vrai défi car cela signifie que la mesure est bien plus difficile, ce qui limite les dimensions du jeu de données, mais Frost a un accord avec Zysense LLC afin de rationaliser le processus de fabrication et de produire des appareils de mesure du monoxyde d’azote commercialisables à même d’améliorer leurs recherches.
Cette collaboration est un aspect fondamental du processus de conception. Afin de fabriquer un bandage à base de monoxyde d’azote au pouvoir cicatrisant personnalisé, l’équipe a prévu de travailler par la suite avec le centre hospitalier UP Portage Health System afin de réunir localement des échantillons de cellules provenant de patients. En augmentant le nombre des échantillons cellulaires − et en appliquant la technologie à des patients réels − l’équipe continuera à amplifier sa base de données tout en approfondissant sa connaissance des mécanismes du monoxyde d’azote.
Dans quelques années, ils prévoient d’obtenir un prototype fonctionnant de bandage qui permette d’oublier les inutiles approximations du nitrite et les applications massives de monoxyde d’azote. Au lieu de cela, les patients souffrant d’ulcères du pied diabétique verront la lumière au bout du tunnel en bien moins de 6 mois car le bandage à libération de monoxyde d’azote pourrait bien aider à guérir en moins d’un mois l’une des maladies les plus coriaces du monde de la santé.
Source : News Medical Life Sciences ; Nitric oxide-releasing technology shows potential to reduce healing time of diabetic foot ulcers; Nov 13 2018