contact@e-pansement.fr      09 72 46 28 88

Des biomatériaux contenant des « protéines Frankenstein » favorisent la guérison des tissus.

Selon une recherche publiée dans la revue Nature Materials, des ingénieurs biomédicaux des universités Duke et Washington de Saint-Louis ont démontré que l’injection d’une protéine artificielle, constituée d’une solution de segments ordonnés et désordonnés, permet la formation d’un solide échafaudage qui réagit à la chaleur corporelle et s’intègre aux tissus sans la moindre marque en l’espace de quelques semaines.

 

Les protéines fonctionnent en se pliant, un peu comme des origamis, et en interagissant avec des structures biomoléculaires spécifiques. Auparavant, les chercheurs pensaient que les protéines nécessitaient d’une forme fixe pour fonctionner, mais au cours des deux dernières décennies, un intérêt croissant s’est manifesté pour les protéines intrinsèquement désordonnées (IDP). Contrairement aux protéines bien pliées, les IDP peuvent adopter une quantité incroyable de structures différentes. Cependant, ces préférences structurelles ne sont pas casuelles et de récentes avancées ont montré qu’il existe des règles bien définies qui mettent en relation les informations contenues dans les séquences d’acides aminés des IDP et les assortiments de structures qu’elles peuvent adopter.

 

Les chercheurs ont émis l’hypothèse qu’une polyvalence de fonction des protéines peut être obtenue en alignant des protéines bien pliées avec des IDP. Cette polyvalence est évidente dans des matériaux biologiques, tels que les fibres musculaires et les fibres de soie, constitués de protéines qui conjuguent des régions ordonnées et désordonnées, permettant ainsi aux matériaux de présenter des caractéristiques telles que l’élasticité du caoutchouc et la force mécanique de l’acier.

 

Les IDP contribuent à la fonction cellulaire, et de nombreux ingénieurs en biomédecine ont concentré leurs efforts sur une IDP appelée élastine, une protéine hautement élastique qui se trouve dans l’ensemble de l’organisme et qui permet aux vaisseaux sanguins et à certains organes (par exemple la peau, l’utérus et les poumons) de reprendre leur forme originale après avoir été étirés ou comprimés. Cependant, la production d’élastine à l’extérieur de l’organisme s’est révélée être un vrai défi.

 

C’est pourquoi les chercheurs ont décidé d’affronter le problème avec une approche d’ingénierie réductionniste. « Nous étions curieux de voir quels types de matériaux nous pouvions créer en mettant de l’ordre dans une protéine hautement désordonnée », déclare Stefan Roberts, étudiant en doctorat auprès du laboratoire Chilkoti et premier auteur de l’article.

 

À cause des défis posés par l’élastine, l’équipe de recherche a travaillé avec des polypeptides similaires à l’élastine (ELP) qui sont des protéines entièrement désordonnées employées pour imiter l’élastine. Ces ELP sont des biomatériaux utiles car ils peuvent expérimenter des changements de phase (de soluble à insoluble et vice-versa) en réponse aux changements de température. Bien que ces propriétés les rendent utiles pour des applications telles que l’administration de médicaments sur le long terme, leur comportement similaire à celui des liquides en empêche l’efficacité en tant qu’échafaudage dans le cas d’application d’ingénierie tissulaire.

 

Cependant, en ajoutant des domaines ordonnés aux ELP, Roberts et son équipe ont créé des protéines « Frankenstein » qui associent des domaines ordonnés et des régions désordonnées, conduisant ainsi à ce qu’on appelle les protéines partiellement ordonnées (POP), pourvues de la stabilité structurelle des protéines ordonnées sans perdre toutefois la capacité des ELP de devenir liquides ou solides selon la température.

 

Conçus en tant que fluides à température ambiante qui se solidifient à la température corporelle, une fois injectés ces nouveaux biomatériaux forment un échafaudage stable et poreux qui s’intègre rapidement aux tissus environnants avec un minimum d’inflammation et une meilleure formation des vaisseaux sanguins.

 

« Ce matériau est très stable après l’injection. Il ne se dégrade pas vite et maintient très bien son volume, ce qui est inusuel pour un matériau à base de protéine », précise Roberts. « Il est également bénéfique pour les cellules qui repeuplent le tissu dans la zone d’injection. Toutes ces caractéristiques pourraient représenter une option viable dans l’ingénierie tissulaire et la cicatrisation des plaies. »

 

Bien que l’échafaudage créé par les POP soit stable, l’équipe a également observé que ce matériau se dissout à nouveau une fois refroidi. Qui plus est, les températures de formation et de dissolution pourraient être contrôlées indépendamment en contrôlant la proportion de segments désordonnés et ordonnés dans le biomatériau. Ce réglage indépendant confère aux POP une mémoire de forme, grâce à un phénomène connu sous le nom de hystérésis qui leur permet de revenir à leur forme d’origine selon un signal de température.

 

L’équipe de la Duke a collaboré avec le laboratoire de Rohit Pappu, professeur d’ingénierie de la fondation Edwin H. Murty du département d’ingénierie biomédicale de l’Université Washington à Saint-Louis, afin de comprendre les bases moléculaires du comportement hystérétique à séquence codée. Tyler S. Harmon, qui était à l’époque étudiant en doctorat de physique dans le laboratoire de Pappu, a développé un modèle de calcul pour montrer que l’hystérésis résulte des interactions différentielles entre les régions ordonnées et désordonnées avec ou sans solvant.

 

« Le fait de pouvoir simuler la base moléculaire pour une hystérésis réglable nous met sur la voie pour concevoir des matériaux avec les structures souhaitées et des profiles à mémoire de forme », explique Pappu. « Cela semblerait une caractéristique jusque là non reconnue de la synergie entre les domaines ordonnés et les IDP. »

 

En continuant ses recherche, l’équipe espère étudier ce matériau sur des modèles animaux afin d’examiner ses utilisations potentielles en ingénierie tissulaire et dans la cicatrisation des plaies, mais aussi pour développer une meilleure compréhension de la raison pour laquelle ce matériau favorise la vascularisation. Si ces études se révèlent efficaces, Roberts est optimiste quant à la capacité de ce nouveau matériau à devenir la base d’une nouvelle entreprise de biotechnologie. Il souhaite également développer une compréhension plus profonde des interactions entre les portions ordonnées et désordonnées dans ces matériaux polyvalents.

 

« Nous étions si fascinés par le comportement de phase dérivé des domaines désordonnés que nous avons négligé les propriétés des domaines ordonnés qui se sont révélées très importantes », affirme Chilkoti. « En combinant les segments ordonnés et les segments désordonnés, un nouvel univers s’ouvre à nous, avec la création de matériaux comportant une formidable structure interne sans perdre leur comportement de phase du segment désordonné, et ceci est tout à fait enthousiasmant. »

 

L’aptitude à amalgamer ces segments en protéines comportant des propriétés uniques permettra aux chercheurs de contrôler avec précision les propriétés de nouveaux biomatériaux pour l’application dans l’ingénierie tissulaire et la médecine régénérative.

Source : R&D; Biomaterials With 'Frankenstein Proteins' Help Heal Tissue; 16/10/2018

  Contactez-nous
  Elevate SAS,

362 Avenue de Verdun
84110 Saint-Romain-en-Viennois

0972 462 888

0897 508 188
Mail : contact@e-pansement.fr

  Derniers tweets @e_pansement